Infertilité: quelles conséquences sur le couple?

by: admin. /   mardi 28 mai 2019 16:19
homme femme dispute tableau noir

L'infertilité et les traitements qui l'accompagnent sont souvent dévastateurs pour le couple. Comment rester soudés dans cette épreuve et faire face aux déceptions qui jalonnent parfois ce parcours?

Jusqu'à ses 34 ans, Nadia, la petite quarantaine aujourd'hui, avait tout pour être heureuse: "un compagnon aimant, un métier passionnant dans l'édition, une vie confortable". Tout, sauf un bébé. "Nous avons commencé à essayer après une dizaine d'années de vie commune. J'étais convaincue que cela arriverait vite, j'avais toujours eu des cycles irréguliers et je n'étais pas toute jeune, certes, mais 34 ans, ça n'est pas si vieux pour tomber enceinte". Pourtant, après plusieurs tests de grossesse "désespérément négatifs", le verdict de la gynécologue tombe, implacable: "insuffisance ovarienne, autrement dit, ménopause précoce". 

"Un choc terrible", se souvient Nadia, dont elle parvient à se remettre, boostée par l'espoir qu'elle place dans la médecine: "J'ai foncé tête baissée dans les traitements en commettant probablement ma plus grosse erreur: je ne me suis pas vraiment demandé si Gilles, mon conjoint, était prêt à affronter tout cela". Après plusieurs fécondations in vitro non concluantes et "des litres de larmes" Nadia et Gilles jettent l'éponge... et se séparent. "Je ne peux pas savoir si notre couple était condamné d'avance ou si la médicalisation de notre sexualité l'a tué, mais le fait est que nous nous sommes réveillés un matin comme deux étrangers, nous nous étions perdus", analyse Nadia. 

Des couples "mis à nu"

Des histoires comme celle de Nadia et Gilles, Sylvie Faure-Pragier, psychanalyste ayant longtemps travaillé à l'hopital Necker, au sein du service de médecine de la reproduction en a été témoin: "La plupart du temps, lorsqu'il est touché par l'infertilité, le couple souffre", confirme-t-elle. "La vie sexuelle est pour ainsi dire contrôlée par les médecins, les conjoints sont mis à nu au sens propre comme au figuré", observe-t-elle. "Certains, même, tiennent jusqu'à ce que la grossesse tant attendue survienne, et réalisent une fois l'enfant né qu'ils ne s'entendent plus, qu'ils ont été usés". 

"Ce n'est pas que l'amour soit amoindri ou déprécié par l'infertilité, c'est qu'il finit par disparaître dans ce désir d'enfant", analyse encore Sylvie Faure-Pragier. Sans parler de la culpabilité ou du ressentiment, difficiles à exprimer, mais qui rongent ceux qui en sont victimes. 

Un sentiment d'injustice qu'il faut arriver à dépasser

Du ressentiment, Amélie, 32 ans, en a éprouvé envers son mari, "stérile". "Non seulement je lui en voulais d'être à l'origine de nos difficultés, mais en plus, cherchez l'erreur: quand nous, les femmes, avons un problème pour concevoir, c'est à nous de subir les traitements. Quand ce sont les hommes qui ne peuvent pas concevoir par voie naturelle... C'est aussi à nous d'endurer les injections, leshormones, etc!" Un sentiment d'injustice qu'Amélie a très vite verbalisé, "trop, sûrement!". "Mais, explique-t-elle, j'ai ensuite voulu voir ce projet comme un projet de couple, quel que soit le "responsable". On fait front à deux, il m'épaule, me soutient. Et je sais qu'il se sent parfois coupable de me faire subir à moi, l'angoissée de tout ce qui est piqûres et univers médicalisé au sens large, ce parcours du combattant." 

"On se parle beaucoup et je vois de mon côté un psy, pour essayer de comprendre, pour apprendre à exprimer ce que je ressens", poursuit Amélie. Un soutien que recommande Sylvie Faure Pragier: "parfois, l'infertilité trouve sa source dans des traumatismes de l'enfance ou toute autre cause psychologique. Parfois elle a une explication physiologique. Mais une chose est sûre, une fois les traitements commencés, il y a une souffrance psychique et un besoin d'être aidé. Or en parler à une personne extérieure au couple, à qui l'on peut tout dire sans peur de blesser l'autre peut être salvateur". 

Une implication mutuelle pour ne pas plier sous le poids de l'épreuve

Autre façon de résister à deux face à la tempête: "impliquer le conjoint dans les démarches, pour l'aider à compenser sa "mise à l'écart physique"". Une démarche adoptée par Amélie et son compagnon: "je lui demande le plus souvent possible d'être à mes côtés, même lorsque je n'ai pas "techniquement" besoin de lui. Je lui ai aussi proposé de gérer la paperasse nécessaire aux FIV: ça m'arrange parce que je n'y comprends rien et que cela m'épuise de courir après les papiers, et je pense que ça l'aide à se sentir plus utile". 

Une communication et un engagement mutuel qui permet à ce jeune couple de ne pas rompre sous le poids de l'épreuve, même si parfois, tel le roseau, il plie. Dans ces moments là, explique Amélie, il leur faut respirer: "nous avons besoin de nous accorder du temps entre chaque tentative ratée, pour encaisser et repartir: en cinq ans, nous n'avons fait "que" trois inséminations et une FIV", explique-t-elle. 

Trouver la force de renoncer

Du temps, il faut en effet s'en accorder, confirme Sylvie Faure Pragier. Il faut aussi, parfois, parvenir à trouver la force de renoncer, avant que le couple n'explose. "Il en va de la responsabilité des médecins", estime-t-elle, "d'admettre que parfois, il n'y a pas de solution médicale, que la grossesse ne sera pas possible". "J'observe d'ailleurs qu'il n'est pas rare que le médecin lui même refuse d'accepter ce qu'il vit lui aussi comme un échec", regrette-t-elle, déplorant par ailleurs "la pression sociale qui fait penser aux couples aujourd'hui que la seule valeur immuable, la seule finalité de l'amour est de faire un enfant". 

"Il y a un travail à faire, à deux, lorsqu'il est établi que cela ne sera pas possible, pour trouver un moyen d'être heureux autrement, même si la souffrance est tenace". Parfois néanmoins, ces histoires se finissent bien. Après sa séparation, Nadia a rencontré François. Deux mois plus tard, elle est tombée enceinte, "un miracle" pour son gynécologue. Leur petite fille a aujourd'hui un an... 

Source:lexpress.fr

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